Séjour des Riveroy

Nombre de messages : 60 Localisation : Patay Date d'inscription : 29/11/2011

Elle avait laissé Jean aider Kalwynn pour les chevaux et la carriole. Les bagages avaient été rentrés, et elle avait demandé que soit posé sur la table de la grande salle le panier que leur avait préparé Elena.
Un grand feu flambait, le soleil entrait à flots par les larges fenêtres: il faisait bon dans la pièce. Elle retira son manteau, beaucoup trop lourd, et défroissa un peu son houppelande rouge, qui avait été bien pratique pour le voyage.
Elle disposa sur la table le pain, le fromage, le jambon et les fruits contenus dans le panier, ainsi qu'un pot de miel et une bouteille de vin et attendit que Kalwynn vienne la rejoindre.

Nombre de messages : 36 Localisation : Vannes Date d'inscription : 10/01/2012

Le Riveroy s'aperçut en arrivant au pied des marches que les bagages avaient été montés. A son tour il grimpa les étages, légèrement claudiquant et le dos raide. Le siège de la carriole s'était avéré un peu dur, et Kal avait dû mobiliser à la fois son attention et ses réflexes pour guider l'attelage tout en participant à la conversation. Le trajet toutefois fut fort agréable, mais le soldat put apprécier à sa juste valeur l'aide déterminée du jeune Jean à l'arrivée.

Parvenu à un premier palier, Kal tenta de se repérer. Une porte semblait entrouverte non loin, un rai de soleil en sortait, et l'on entendait crépiter un sympathique feu. Le Borgne jeta un coup d'oeil à ses bottes... cela pourrait aller. Il respira rapidement le col de sa tunique, en espérant ne pas amener à l'intérieur une trop puissante odeur de cheval.

En deux grandes enjambées, il fut devant la porte à laquelle il toqua. Le mouvement ouvrit plus largement celle-ci, ce qui révéla une table chargée de victuailles. Kal s'aperçut qu'il était affamé.

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Un coup léger fut frappé à la porte, qui s'ouvrit largement devant Kalwynn. Joshin se leva aussitôt:

- Venez vous asseoir, Elena nous avait préparé un repas frugal qui sera la bienvenu sans doute après ce voyage.

Ils prirent place l'un en face de l'autre. Elle faisait face à la fenêtre, et pouvait apercevoir le parc, bien abandonné lui aussi. Elle ne s'était pas suffisamment occupée ni de Saint-Gondon ni du domaine de Riveroy, et en éprouvait des remords. Finalement, elle avait été le plus souvent engagée dans des armées ou dans des voyages plus ou moins lointains, et, pendant les courts intervalles entre deux campagnes, elle s'était presque uniquement occupée de sa maison de Patay. Seule, il lui était difficile de tout concilier.

C'était le deuxième repas qu'elle prenait avec Kalwynn depuis son retour. En le regardant, en imaginant le tableau paisible qu'ils devaient former assis tous deux à la grande table, elle eut un instant de regret, en pensant à ce qui aurait pu être. Elle avait toujours, dans son coffret, l'anneau qu'il avait fait faire pour elle.
Elle soupira:

- Je vous suis reconnaissante de m'avoir accompagnée à Saint-Gondon. J'avoue que sans vous, j'aurais encore tardé à venir.
Cet après-midi, j'irai voir le père de Jean, et j'aimerais avoir votre opinion. Le jeune homme m'a fait bonne impression, je pourrais l'engager à temps plein, en même temps qu'une ou deux servantes. Sans doute n'y a-t-il pas suffisamment de travail sur les terres qu'ils travaillent pour qu'ils puissent y vivre aisément, un salaire en bon écus sera peut-être le bienvenu. Qu'en pensez-vous?

Elle attendit sa réponse en se disant qu'il lui faudrait ensuite répondre aux questions qu'il lui avait posées juste avant leur arrivée.

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A l'invitation de Joshin, le Borgne ne se fit pas prier et s'assit à table, après avoir jeté un regard par la fenêtre sur le parc. Le soleil d'hiver lui réchauffait le dos, et éclairait le visage de Joshin. Le Riveroy crut voir passer un sentiment étrange dans le regard de la dame des lieux. Elle soupira imperceptiblement, avant de le remercier pour le voyage fait ensemble vers Saint-Gondon, puis de lui reparler du jeune homme, Jean.

- Je vous en prie, je suis très heureux de vous accompagner ici. Revoir ces lieux me rappelle de nombreux souvenirs. J'espère que vous me ferez l'honneur et le plaisir de me rendre visite à Tarvieg. J'ignore encore à quoi ressemble ces terres que l'on prévoit de me confier, je dois l'avouer. Il y a de fortes chances que les jardins en soient bien plus échevelés que le parc de Saint-Gondon !

Il eut un sourire, et proposa du vin à son interlocutrice.

- Pour ce qui est de Jean, le gaillard m'a l'air faisant et fort honnête. S'il est resté pour attendre, peut-être avait-il envie de se montrer justement, et espérait-il passer davantage de temps à se rendre utile ici. Il est vrai que votre domaine et ses prairies semblent toujours aussi agréables. Une discussion avec son père nous éclairera, mais l'idée paraît bonne en effet.

Il avait dit "nous" sans réfléchir, Joshin ne l'avait pas convié à l'accompagner dans cette démarche. Le chevalier de l'Hermine n'avait d'ailleurs pas trop songé à la suite... allait-il ramener Joshin au domaine Riveroy ou bien pensait-elle rester quelques temps ici ? Lui devrait repartir sous peu, pour aller jeter un oeil à la baronnie de Thouaré-sur-Loire.

- Pensez-vous que durant notre présence ici, nous verrons votre suzeraine ?

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Elle sourit, contente qu'il proposât spontanément de l'accompagner:

- Je suis contente que Jean vous ait également fait bonne impression. Nous verrons ce que dira son père de notre idée de l'employer au domaine. D'ailleurs, avec un peu de chance, il aura peut-être une soeur ou une personne de sa famille qui acceptera de venir également.

Quels que soient ses engagements, elle savait qu'elle avait les moyens de rétribuer quelques serviteurs. Elle avait toujours été assez économe, sans doute que son enfance et sa jeunesse pauvres avaient laissé des traces.
Le fromage et le jambon étaient bons, elle reprit une tranche de pain et poursuivit:

- J'ai envoyé un courrier à Kalimalice pour l'informer que nous serions ici, et j'avoue que j'aurais grand plaisir à la revoir. Mais il est vrai qu'elle est toujours très occupée...
Et avant que je n'oublie, il me faut répondre aux questions que vous avez posées avant que nous arrivions. Je vais essayer de le faire aussi clairement que possible.
Arfast n'était pas le vassal de Lexhor, je ne pense pas qu'il y avait grande amitié entre eux, mais de Justine d'Alesme, morte elle aussi depuis longtemps. Elle lui avait donné le Rouvray, qui m'a été retiré, comme la noblesse d'ailleurs, à la mort d'Arfast.

Une ombre de mélancolie voila son regard. Les moments qui avaient suivi le décès de son mari avaient été bien difficiles. Elle reprit:

- Par je ne sais quelle disposition, la terre du Rouvray est passée, à la mort de Justine d'Alesme, à Ursus de Valbois, dont vous vous souvenez peut-être. Il les a données ensuite à Edward de Colleville, puis les lui a repris et maintenant elles appartiennent, si mes souvenirs ne me trompent pas, à dame Rosemay.

Il était bon qu'il s'intéressât à ce qui s'était passé dans la famille qui était aussi la sienne:

- N'hésitez pas à me questionner, si quelque chose ne vous semble pas clair.

Le repas s'achevait. Ils devaient aller voir le père de Jean, et en profiteraient aussi pour voir l'état des terres.

- Si ce n'est pas indiscret, puis-je vous demander quels sont vos projets immédiats?

Oui, c'était un peu indiscret, elle en avait conscience, mais ma foi, tant pis, la question était posée.

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Joshin prit le temps de répondre à toute ses questions, et le Borgne écouta attivement en hochant par moment la tête. Il se surprenait lui-même à ne s'être point intéressé davantage à sa famille de années plus tôt. Et cela ne pouvait qu'accroître son regret de n'avoir pas davantage connu son Parrain… mais à l'époque du Baptême, Kal n'était pas encore un Riveroy, il eut été difficile pour le jeune soldat de questionner son capitaine.

Il grimaça dans sa barbe quand Joshin évoqua la perte des terres du Rouvray. Il commençait tout juste à découvrir à quel point les eaux dans lesquelles évoluaient les nobles pouvaient être traitresses…

"- J'espère moi aussi que nous profiterons de cette visite pour au moins apercevoir Kalimalice. Et je vous remercie d'avoir pris le temps de me conter davantage l'histoire de notre famille. Oui je me souviens d'Ursus, c'était un homme bien… du moins c'est ainsi que je me le rappelle."

Le Borgne surprit le regard de Joshin qui s'évadait par la fenêtre. Le repas maintenant terminé, la maîtresse du domaine avait quelques visites à assurer, et Kal s'était proposé d'être son escorte.

"- Si ce n'est pas indiscret, puis-je vous demander quels sont vos projets immédiats?" lui demanda-telle.

Kalwynn se tritura un instant la barbe.

"- Une fois que la validité des serments vassaliques m'aura été confirmée par le collège d'armes de Bretagne, j'irai découvrir le fief qui m'a été confié... et je pense qu'il y aura fort à y faire. A ce propos je renouvèle mon invitation de vous y recevoir, quand tout sera aménagé. Par ailleurs, il m'a été demandé d'élaborer mon blason familial, et je songe, si vous le permettez, à faire apparaître dans un brisé les couleurs des Riveroy. Je ne sais pas encore si cela sera techniquement possible, peut-être devrais-je vous solliciter pour une "autorisation"... c'est encore peu clair pour moi."

Un silence.

"- Mais pour le moment je suis prêt à vous accompagner où vous le souhaiterez dans le domaine, ou à apporter mon aide là où elle pourrait être utile... par ailleurs, il me faudra remercier Elena pour ces excellentes provistions qu'elle avait songé à glisser dans notre carriole."

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Si elle avait espéré qu'il la convierait à découvrir avec lui son nouveau fief, elle n'en fit rien paraître:

- C'est avec plaisir que je viendrai vous voir en Bretagne lorsque vous le souhaiterez. J'attendrai votre missive.
Pour ce qui concerne votre blason, je ne crois pas qu'il y ait d'empêchement à ce que vous fassiez apparaître les couleurs des Riveroy: elles sont sur mon blason de Saint Gondon, et nul jusqu'à présent n'y a trouvé à redire.

Leur modeste repas était terminé. Elle se leva:

- Si vous voulez, nous pourrions maintenant aller voir le père de Jean. J'espère que nous arriverons à un accord avec lui, et je n'aurai plus aucune raison de m'attarder ici. Je profiterai donc de votre retour - et de la carriole - pour revenir avec vous au domaine, si vous le voulez bien.

(Quelques heures plus tard)

Le soleil commençait à baisser à l'horizon lorsqu'ils quittèrent les parents de Jean. L'entretien s'était déroulé de façon fort satisfaisante pour les deux parties sans doute, et ils étaient arrivés sans peine à un accord.
Les parents de Jean étaient des fermiers simples, mais attachés à la terre qu'ils travaillaient, et par extension, à la maîtresse des lieux. Il faut avouer qu'elle ne les accablait ni de demandes ni de jérémiades, ce qu'ils semblaient apprécier. Jean avait deux soeurs, un peu plus jeunes que lui, et à l'évidence il n'y avait pas de travail pour tout le monde à la ferme. Il fut donc convenu que Jean s'occuperait du domaine, et que ses soeurs viendraient, lorsque Joshin serait là, pour s'occuper des lieux d'habitation. Elles les avaient d'ailleurs précédés, afin de préparer les chambres et ce qui promettait d'être un repas un peu plus consistant que celui qu'ils avaient partagé à midi: Joshin savait que leur mère les avait chargées d'un panier qui contenait, d'après ce qu'elle pu apercevoir, des pots de confiture, des oeufs et un poulet qu'elle avait promptement tué et préparé pendant que son mari parlait salaires. Là non plus, il n'y avait pas eu de problèmes: Joshin n'avait pas lésiné, ne voyant pas l'utilité de faire des économies alors qu'elle avait de quoi payer. Bref, tout s'était passé au mieux.

Ils rentraient sans se presser, dans cette fin de journée anormalement chaude pour un mois de février. Ils passèrent près d'un prunus en fleurs, et elle s'arrêta un instant:

- J'adore l'odeur des fleurs de prunus

dit-elle rêveusement. Elle pensait au gros prunus qui se trouvait dans le jardin de sa maison de Patay, et dont elle avait fait prendre des rejets pour les planter au domaine et à Saint Gondon. Elle avait remarqué un jour un trou parfaitement rond dans le gros tronc noueux du prunus et appris avec surprise que c'était le nid d'un pic vert. Quelques jours plus tard, elle l'avait brièvement aperçu, sautillant dans l'herbe à la recherche de nourriture, et elle avait été émerveillée par ses couleurs et par sa vivacité craintive. Elle espérait qu'il était de nouveau là, et qu'elle-même serait revenue avant que le prunus n'ait fini de fleurir.
Ils arrivaient en vue de la maison:

- Merci de m'avoir accompagnée. J'avais des remords de laisser à l'abandon de si beaux domaines, mes remords sont plus vifs maintenant car j'ai conscience d'avoir aussi négligé les personnes qui y vivent, et celà est impardonnable. Avant de repartir, j'aimerais aller voir les autres fermiers, même brièvement. Voudriez-vous m'accompagner?

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La carriole aura été finalement fort utile. Et si Kal s'était senti peu à l'aise dans un premier temps, assis sur le banc à tenir les rênes, il finit par y prendre goût. Ce mode de transport permettait -presque- de profiter davantage du paysage qu'une chevauchée ordinaire.
Et au moins les voyageurs n'étaient pas tentés de faire la course les uns contre les autres !

Ils firent route jusqu'à la maison habitée par Jean, ses parents et ses sœurs. Le Borgne laissa Joshin conduire l'entretien. Il posa tout même quelques questions sur la qualité des terres et des dernières récoltes, et joua un peu avec le chien. A l'issue de la visite, Joshin paraissait satisfaite de l'accord conclu.

Le cœur léger, ils reprirent le chemin du domaine. La soirée était presque printanière.
Joshin le fit arrêter l'attelage, et contempla pensivement un arbre aux fleurs roses.

- J'adore l'odeur des fleurs de prunus.

Le souvenir revint à Kal d'une promenade dans le parc du domaine Riveroy, et d'un moment qu'ils passèrent assis sur un banc de pierre. Joshin aimait plantes et fleurs. Il fixa les rènes entre ses mains gantées, et le nom d'un homme dont Joshin lui avait parlé lui trotta dans la tête. Il s'ébroua pour chasser l'idée. La jeune femme resta songeuse jusqu'à leur arrivée devant les bâtiments.

- Merci de m'avoir accompagnée. J'avais des remords de laisser à l'abandon de si beaux domaines, mes remords sont plus vifs maintenant car j'ai conscience d'avoir aussi négligé les personnes qui y vivent, et celà est impardonnable. Avant de repartir, j'aimerais aller voir les autres fermiers, même brièvement. Voudriez-vous m'accompagner?

Le Riveroy sourit doucement dans sa barbe. Il était heureux d'être là, sans grande hâte de voir la promenade s'achever.

- Si je puis me permettre un humble conseil... ne soyez pas trop dure avec vous-même. Il me paraît difficile de se consacrer à plusieurs domaines, et nous autres soldats sommes finalement davantage attirés par la route et les casernes. Le moment viendra, ou non, naturellement, nous pousser à être plus sédentaires. Enfin je suppose...

Pour ce qui est des autres fermiers à visiter, je suis bien sûr prêt à vous y accompagner.

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Dès qu'ils arrivèrent, Jean s'avança pour s'occuper de la carriole. Kalwynn l'aida à descendre, et, du coin de l'oeil, elle vit le jeune valet flatter l'encolure du cheval. Celà lui fit plaisir, elle aimait que les bêtes soient bien traitées. Ils entrèrent dans la grande salle, où le feu continuait de crépiter

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Elle avait vu en arrivant que deux cheminées correspondant aux chambres fumaient, et ils sentirent de bonnes odeurs qui leur parvenaient de la cuisine. Les soeurs de Jean étaient à l'oeuvre, elle avait bon espoir que cette fratrie qu'elle avait engagée un peu rapidement, presque sur un coup de tête, se plairait à son service. Elle se tourna vers Kalwynn:

- C'est agréable de rentrer dans une demeure qui semble vous attendre. Et, si je ne craignais pas de me montrer un peu trop présomptueuse, je dirais que le plaisir est doublé quand tout est prêt à votre arrivée. Vous connaîtrez bientôt ce plaisir et j'imagine que vous devez avoir hâte de découvrir votre fief. Je n'en suis que plus touchée que vous acceptiez de m'accompagner chez les autres fermiers: nous pourrions y aller demain, afin de ne pas trop vous retarder.

Un petit peu plus tard, ils se retrouvèrent, comme ils en étaient convenus, pour le repas du soir. Elle avait eu le temps de se changer, sachant qu'il ferait chaud dans la grande salle, et s'était vêtue plus simplement et confortablement d'une jupe et d'un bustier assorti. Ils prirent place à table, et pendant que la plus âgée des deux servantes - qui s'appelait Marie, alors que sa soeur s'appelait Anne - commençait à les servir, elle répondit à la remarque que lui avait faite Kalwynn:

- Je vous sais gré de vouloir me déculpabiliser. Il est vrai que la vie itinérante que nous autres, soldats, menons la plupart du temps, ne se prête guère à la bonne gestion d'un, ou à plus forte raison, de deux domaines. Il y a de plus le port de Blois. Même s'il ne demande qu'un minimum d'attention, puisque la chef de port s'en occupe à la perfection, il me faudra sans tarder aller à Blois pour verser ma part de l'agrandissement qui est en cours. Nous en parlerons plus avant, si celà vous intéresse. Nous n'avons fait qu'effleurer la question, tous les documents le concernant se trouvent au domaine.
Vous supposez justement en pensant que le moment vient où on souhaite être plus sédentaires. Je crois que ce moment commence à m'apparaître dans un futur pas si lointain. Etre revenue au domaine puis ici m'a donné l'envie de m'y consacrer davantage.

Elle réprima un soupir:

- M'aiderez-vous pour le domaine? Après tout, c'est aussi le vôtre puisque c'est celui des Riveroy. Nous pourrons y retourner, si vous êtes d'accord, dès que nous aurons vu les fermiers. J'avais espéré que Kalimalice viendrait nous rendre visite, mais celà n'a pas du lui être possible. Je le regrette, et, voyez-vous, celà confirme bien ce que nous disions tout à l'heure: partir guerroyer d'un bout à l'autre du royaume ne permet plus d'avoir un peu de temps pour des choses qui sont aussi importantes dans la vie, comme les relations d'affection ou d'amitié.

Nombre de messages : 36 Localisation : Vannes Date d'inscription : 10/01/2012

Si l'après-midi avait été beau, le froid tombait avec le crépuscule, et la fumée des cheminées augurait d'une chaleur bienvenue.

Une fois rentrés, les Riveroy partirent chacun se changer en vue du dîner. Kal découvrit qu'une jolie petite chambre avec vue sur les arbres du parc lui avait été préparée. Il n'avait pas prévu un séjour prolongé et se trouverait vite à court d'effets. Il passa une chemise propre et redescendit.

Voyant Joshin bien plus présentable que lui, il la pria de bien vouloir le pardonner pour sa tenue. S'asseyant, il se fit la remarque qu'il n'avait pas partagé autant de repas avec quelqu'un depuis longtemps. Il eut la brève impression d'être un gourmand fardeau.

La conversation roula du port de Blois au domaine Riveroy.

"- Je ne sais si les routes sont actuellement sûres en Orléans, mais si vous devez convoyer une somme d'argent entre Patay et Blois, je puis certainement me débrouiller pour être là et vous accompagner."

Son regard inspecta l'agréable salon où ils se trouvaient.

"- Bien sûr, je puis vous aider pour le domaine. Je vais devenir un véritable gestionnaire terrien si ça continue ! Vous voyez-vous plutôt vivre davantage au domaine Riveroy ou à Saint-Gondon ? Il est parfois difficile de se consacrer à plusieurs tâches à la fois, comme nous le disions précédemment.

Et effectivement, comme vous l'évoquiez, j'ai hâte de découvrir Tarvieg et les gens qui y vivent… paradoxalement, j'en repousse un peu le moment, pour le réussir et l'apprécier à plein."

Un sourire.

"- Finalement ni le voyage à des fins guerrières, ni la sédentarité n'empêchent de se consacrer aux relations d'affection ou d'amitié, ne croyez-vous pas ?"

Nombre de messages : 60 Localisation : Patay Date d'inscription : 29/11/2011

Elle sourit:

- Non, bien sûr ,ni le voyage à des fins guerrières, ni la sédentarité n'empêchent de se consacrer aux relations d'affection ou d'amitié. Mais ils les rendent parfois un peu plus difficiles, non? Lorsqu'on a le temps de se consacrer à quelqu'un, ou à tout le moins lorsqu'on peut lui consacrer du temps, comme vous le faites actuellement avec moi, il est certain que les relations sont moins "distendues", dirons-nous, que lorsque ces mêmes personnes sont par voies et par chemins, chacune de leur côté.

Elle nuança un peu son propos:

- Grâce au ciel, j'ai de bonnes relations d'amitié avec plusieurs personnes, même si je ne les vois pas souvent. Notre amitié se maintient malgré l'absence. Mais en même temps, je regrette ce manque de contacts.

Le repas était bon, comme elle l'avait pensé. Elle ne voulait pas se réjouir trop tôt, mais sans doute avait-elle eu raison d'engager ces jeunes filles et leur frère. Il faisait bon dans la pièce, le feu et les bougies donnaient de beaux reflets aux meubles. Oui, cela avait été une bonne idée que ce voyage à Saint Gondon.

- Je ne sais si je me consacrerai plus à un domaine qu'à un autre: les deux me sont chers, même si j'ai peut-être, en y réfléchissant bien, un préférence pour le domaine de Riveroy, qui est quand même le berceau de la famille. Même si la famille est réduite, pour l'instant. Mais peut-être s'agrandira-t-elle, à l'avenir.

Il lui avait parlé de sa compagne: peut-être aurait-il des enfants qui continueraient la lignée. Qui pouvait le savoir?

- En tous cas, je vous remercie de votre offre de m'accompagner de Patay à Blois. Nous en reparlerons. Même si je vous en suis très reconnaissante, je crains bien d'accaparer trop de votre temps, ne croyez-vous pas?

Nombre de messages : 36 Localisation : Vannes Date d'inscription : 10/01/2012

Qui aurait pu prédire, lorsque Kal était revenu à Vannes et avait sollicité les bons conseils de son chef de famille, qu'ils en seraient là aujourd'hui, discourant paisiblement autour d'un succulent dîner. Joshin semblait avoir fait un choix avisé en se remettant aux sœurs de Jean.

Oui je partage évidemment votre sentiment. L'absence et l'éloignement, quoi qu'on en dise, pèsent sur les relations. J'ai, par exemple, des difficultés à beaucoup voir ma compagne Nena, qui de plus refuse toute forme d'engagement de couple. Je crois donc qu'il faudra attendre un peu avant de voir courir partout de nouveaux petits Riveroy…

Sourire un peu triste de Kal. Pourquoi partait de cela à Joshin ?

Je vous confirme donc que pour un moment vous serez mon héritière, pour les registres nobiliaires bretons. Si vous le permettez je mettrais à jour les archives familiales au domaine, en y déposant un exemplaire de la patente relative à mon anoblissement.

Un silence.

Très bien, j'attendrai de vos nouvelles concernant le port de Blois. Et non, vous n'accaparez point mon temps. Ne sommes-nous pas amis et parents ? Cette relation n'est pas donnée à n'importe qui.

Il lui sourit.

Mais effectivement, il va me falloir reprendre la route sous peu. Il me reste plusieurs invitations à honorer en Bretagne, avant d'aller prendre la mesure de mon fief.

Nombre de messages : 60 Localisation : Patay Date d'inscription : 29/11/2011

Elle ne put réprimer un mouvement de surprise:

- Vous envisagez avec un certain détachement de ne pas avoir d'enfants. Je pensais au contraire que vous auriez souhaité fonder une famille, car je vous crois fermement attaché à ses valeurs.

Elle rougit et baissa les yeux:

- Pardonnez-moi. En plus d'être indiscrète, je fais preuve d'un grand manque de délicatesse. Veuillez m'excuser, et oublier ce moment.

Elle n'avait pas osé dire qu'elle se couvrait la tête de cendres, mais c'est bien l'impression qu'elle ressentait, avec le besoin de se cacher dans un trou de souris. Qu'est-ce donc qui l'avait poussé à faire cette réflexion? Elle s'empressa de poursuivre:

- Je comprends votre hâte à partir. Si vous êtes d'accord, nous pourrions voir rapidement les autres fermiers demain matin, et reprendre la route pour le domaine, d'où vous pourrez partir à votre meilleure convenance.
Pour ma part, j'y resterai encore un peu puis partirai sans doute à Patay.
Ah! et puis, pour cette question d'héritage....ce n'est pas à l'ordre du jour, heureusement, et j'espère que ce n'est pas près de l'être.

Elle se garda bien de lui dire qu'elle n'était pas sûre que la transmission soit aussi facile qu'il semblait le penser: bien que feu son époux ait rédigé un testament en bonne et dûe forme, elle n'avait hérité de strictement rien, et c'était miracle qu'elle ait pu conserver le nom des Riveroy.
Il se rendrait compte, peu à peu, que la vie de noble n'était pas toujours de tout repos.

Nombre de messages : 36 Localisation : Vannes Date d'inscription : 10/01/2012

D'un geste doux, le Borgne tenta d'apaiser Joshin, qui paraissait se reprocher sa dernière phrase.

Non pas, chère amie, ce n'est pas du détachement mais... un triste constat. J'espère grandement que l'opportunité me sera donnée un jour de fonder une famille, et ainsi de concourir à l'agrandissement de la nôtre. Mais ce n'est malheureusement pas à l'ordre du jour.

Un haussement d'épaules un peu las. Cette situation même causait des remous dans sa vie. Il en était venu à se questionner sur l'avenir de sa relation actuelle... et se trouvait depuis peu douloureusement attiré par une femme beaucoup plus jeune. Mais de cela, il n'en parlerait pas à Joshin, ou en tout cas pas tout de suite.

Et si je vous donne l'impression d'avoir hâte de partir, sachez qu'il n'en est rien. Simplement, je suis finalement resté peu chez moi depuis mon retour aux affaires en novembre dernier. Et je prévois sous peu un long voyage par la mer, qui devrait me mener jusqu'à Alexandrie. Il me faut donc régler un certain nombre de formalités avant d'embarquer.

Un silence.

Donc oui, avec plaisir pour voir demain le reste de vos gens, puis reprendre la route du domaine Riveroy.

Nombre de messages : 60 Localisation : Patay Date d'inscription : 29/11/2011

Une ombre était passée sur le visage de Kalwynn, ombre qu'elle ne sut interpréter.
Mais en l'écoutant, elle se sentit encore plus embarrassée: elle le connaissait pourtant, et peu à peu, pendant ces quelques jours qu'ils passaient ensemble, elle se souvenait de plus en plus du Kalwynn d'autrefois. Et bien sûr, jamais il n'aurait parlé avec désinvolture de ne pas fonder une famille.
Il lui faudrait apprendre à mieux tenir sa langue, à l'avenir, et éviter les paroles d'autant plus blessantes qu'elles avaient été irréfléchies.

- L'avenir dira ce qu'il adviendra de nous et de notre famille. Il arrive parfois des évènements heureux, comme votre retour.

Vous me dites que vous pensez aller à Alexandrie: j'y suis allée il y a quelque temps, et j'en garde un bien beau souvenir. J'ai souvent pensé que j'aimerais y retourner.

Le repas s'achevait. Elle se leva:

- Avant de vous souhaiter une bonne nuit, laissez-moi vous dire combien ce voyage à Saint Gondon m'a été agréable, et combien il m'a permis de mieux me rendre compte de ce qui était important à mes yeux.
Soyez-en remercié, vraiment.

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